Duong Thu Huong
Auteure de nouvelles, romans, pièces de théâtre, poésies, mais aussi d’articles, Duong Thu Huong, née en 1947, est une combattante. À vingt ans, elle se porte volontaire pour aller sur le front de Binh Tri Thien, province alors la plus bombardée par l’aviation américaine. En 1979, elle se trouve parmi les premières écrivaines à la frontière septentrionale, lors de l’agression chinoise. Le 14 Avril 1991, les autorités vietnamiennes l’arrêtent. En France, sous l’impulsion d’Antoinette Fouque et avec l’aide de son traducteur, une pétition signée par de nombreux intellectuels français et vietnamiens demande sa libération immédiate. Duong Thu Huong sera libérée en Octobre 1991. Elle vit aujourd’hui à Paris.
Duong Thu Huong est partie à vingt ans au front, dans la province la plus bombardée par l’aviation américaine. Ce roman raconte les souffrances de cette guerre.
«Toute la nuit, j’ai entendu le vent hurler dans la gorge des Âmes Perdues. D’interminables gémissements entre-coupés de sanglots. Parfois, il hennissait comme une jument en chaleur. Le toit de bambou tremblait, les tiges écrasées sifflaient. On eût dit qu’une symphonie funèbre traversait la campagne. Notre veilleuse vacillait, prête à s’éteindre. J’ai sorti la tête de la couverture. J’ai soufflé la flamme, espérant sombrer corps et âme dans la nuit. Une branche morte frappait le mur en cadence. Impossible de dormir. Dehors le vent mugissait comme une bête sauvage ! Alors j’ai murmuré une prière : « Chères sœurs, vous qui avez vécu et êtes mortes en êtres humains, ne nous hantez plus. Protégez-nous. Armez nos corps, éclairez notre esprit, faites que nous puissions vaincre à chaque combat… Quand viendra la victoire, quand notre patrie connaîtra la paix, nous vous ramènerons à la terre de vos ancêtres. » J’ai enfoui mon visage sous la couverture. J’ai essayé d’oublier le vent. Mais le vent continuait de transpercer la couverture, de s’engouffrer dans la gorge des Âmes Perdues. Deux semaines auparavant nous y avions enterré six jeunes filles.» D.T.H.
- 1992 (Nouvelle édition Sabine Wespieser, 2012)
- 252 p.
La Presse en parle
Un roman sur la guerre comme on en écrit ailleurs, mais pas à Hanoï. Un roman qui n’est pas seulement une fiction puisque Huong, longtemps communiste, a fait la guerre. Derrière son héros – un homme, un officier, comme pour tromper l’ennemi – on reconnaît l’expérience de celle qui a ressenti dans sa chair et dans son cœur les combats et la faim, les marches harassantes et les bombardements. Comme dans Les Paradis aveugles – et avec une aussi belle traduction de Phan Huy Duong -, l’auteure est à l’affût de toutes les sensations.
Patrice de Beer, Le Monde, 29 mai 1992
Bibliographie
Aux éditions des femmes-Antoinette Fouque
- Les paradis aveugles, 1991 (Nouvelle édition Sabine Wespieser, 2012)
Autres éditeurs
- Histoire d’amour racontée avant l’aube, Éditions de l’Aube, 1995
- Au-delà des illusions, Philippe Picquier, 1996
- Terre des oublis, Sabine Wespieser, 2006, le livre de poche, 2007
- Sanctuaire du cœur, Sabine Wespieser, 2011, le livre de poche, 2013
- Les Collines d’eucalyptus, Sabine Wespieser, 2014